lundi 26 janvier 2015

Gustavo Dudamel à la Philharmonie

Julián Orbón "Tres Versiones sinfónicas" 
Gustav Mahler "Symphonie n° 5"


Le chef Gustavo Dudamel était à la Philharmonie avec son fameux Orquesta Sinfónica Simón Bolívar de Venezuela.


Julián Orbón est né en Espagne en 1925. Après des études au Conservatoire d’Oviedo, il suit sa famille à La Havane où il commence très jeune à composer et se forme auprès de José Ardévol, le plus grand compositeur cubain du début du XXe siècle. Dans les années 1940, Orbón devient membre du Grupo de Renovación Musical d’Ardévol, lequel, comme d’autres mouvements nationalistes de l’époque, tente d’établir les principes d’une musique classique basée sur les traditions indigènes.
La première partie, Pavana, prend pour modèle la musique espagnole du XVIe siècle mais la revêt du style de Copland, avec lequel Orbón a étudié en 1946.
Ces trois versions sont hautes en couleurs et très démonstratives, donnant autant de place aux cuivres qu'aux cordes ou aux percussions, aux côtés du piano. (notes de concert)

Pour sa cinquième Symphonie, Gustav Mahler délaisse la voix mais livre une œuvre polyphonique, longue, puissante, riche de ruptures. Elle s'ouvre par une sonnerie de trompette solo, s'interrompt par exemple par des pizzicati.


dimanche 11 janvier 2015

Niki de Saint Phalle au Grand Palais


Née en France en 1930, Niki de Saint Phalle va vite vivre aux États-Unis, elle se marie à l'âge de 19 ans. Épouse, mère mais aussi mannequin, elle fréquente énormément le milieu de l'art et devient une artiste autodidacte. Ses premières œuvres sont des assemblage d'objets hétéroclites et des drippings, façon Jackson Pollock. Durant toutes les 60, elle réalise ses tirs. Elle explique : "ce rituel me permettait de mourir de ma propre main et de me faire renaître."

Sur le mur de la rage elle explique qu'elle tire sur la faim, l'injustice, le fanatisme religieux, le sida, la décadence, le conformisme ou l'ignorance.
Ses tirs atteignent des structures de plâtre et des sacs de peinture qui explosent lorsqu'ils sont touchés par une balle. 
Entre-temps, elle divorce et se mariera avec Jean Tinguely qui a fait de même.
"Le communisme et le capitalisme ont échoué. Je pense que le temps est venu d'une nouvelle société matriarcale." défend t-elle. 
Après ses sorcières, mariées et déesses, elle réalise ses fameuse Nanas en papier collé, laine, tissu et grillage. Dans une vidéo, elle expose qu'on devrait verser un salaire au maire car c'est un vrai métier à temps plein. La taille de ses Nanas est à la mesure du pouvoir des hommes.
Le Jardin des Tarots
De 1978 à 1998, elle réalise le jardin des Tarots, suite à un déclic qu'elle a eu dans le parc Güell de Barcelone. Elle veut alors elle aussi réaliser son palais façon Facteur Cheval.












mercredi 7 janvier 2015

Les règles du savoir-vivre dans la société moderne


Pièce de Jean-Luc Lagarce vue au Théâtre des Déchargeurs.Naître, ce n'est pas compliqué. Mourir, c'est très facile. Vivre, entre ces deux événements, ce n'est pas nécessairement impossible. Il n'est question que de suivre les règles et d'appliquer les principes pour s'en accommoder, il suffit de savoir qu'en toutes circonstances, il existe une solution, un moyen de réagir et de se comporter, une explication aux problèmes, car la vie n'est qu'une longue suite d'infimes problèmes, qui, chacun, appellent et doivent connaître une réponse.Il s'agit de connaître et d'apprendre, dès l'instant déjà si mondain de sa naissance, à tenir son rang et respecter les codes qui régissent l'existence.Il s'agit enfin de contrôler ses peines, de pleurer en quantité nécessaire et relative, de juger de l'importance de son chagrin et toujours, dans les instants les plus difficiles de la vie, d'évaluer la juste part qu'on leur accorde.
Seul en scène, le comédien Martin Juvanon du Vachat débite toutes les conventions sur le même ton. Il y a quelque chose hypnotique comme une litanie, avec quelques refrains comme "logique", "possible", "envisageable".
Il déroule toutes les conventions sociales de la naissance à la mort, en passant par la demande en mariage, les fiançailles, les noces d'argent ou d'or. Toutes ces conventions qui rythment la vie humaine, organisent la société humaine. Elles sont rassurantes, elles représentent la normalité, voire un idéal, elles existent car on a besoin d'y croire. On se prendrait presque à croire qu'elle sont la condition du bonheur. Pas de questionnement, pas de déception, pas de violence, la voie est tracée vers l'harmonie. Le narrateur est une personne qui vit par procuration en parlant de la vie des autres, d'autres vies que la sienne. François Thomas a pris le partie de travestir en femme ce narrateur, "qui ne fait que jouer et se fabriquer son théâtre." Cela apporte aussi une distance ironique à ces règles édictées.
Publié en 1994, ce texte de  Jean-Luc Lagarce reprend le texte de la baronne Staffe, publié au XIXè siècle. "Il existe un livre, ce livre règle tout, il propose une solution pour tous les instants de la vie, il organise et rassure. C'est un livre absolu." expliquait l'auteur.


Extrait :
La fête des fiançailles se passe en famille, dans une intimité rigoureuse. Les amis de la veille, ce qu’on appelle les connaissances, n’y assistent pas. On n’expose pas le bonheur ingénu de la jeune fille, ses joies rougissantes, aux yeux et commentaires, car commentaires à craindre, on n’en saurait douter, aux yeux et commentaires des indifférents et des cyniques.

Le fiancé envoie son premier bouquet le jour des fiançailles. Ce bouquet est composé de fleurs blanches, parmi celles que préfère la fiancée dans cette couleur. Elle est ravie de cette coïncidence de bon augure.
Il apporte lui-même la bague. Il a consulté discrètement pour savoir quelle est la pierre favorite de la jeune fille, car il ne doit pas acheter cet anneau au hasard. Il y a des fiancées qui ont peur des perles, parce qu’elles s’imaginent qu’elles présagent des larmes. C’est crétin, mais on ne peut commencer dès le jour des fiançailles à le dire.
Quelle qu’elle soit, de toute manière, la bague doit être bien accueillie, c’est le moins qu’on puisse espérer. La jeune fille s’émerveille et s’exclame : « Ah… ».


dimanche 4 janvier 2015

Timbuktu

Non loin de Tombouctou tombée sous le joug des extrémistes religieux, Kidane  mène une vie simple et paisible dans les dunes, entouré de sa femme Satima, sa fille Toya et de Issan, son petit berger âgé de 12 ans.
En ville, les habitants subissent, impuissants, le régime de terreur des djihadistes qui ont pris en otage leur foi. Fini la musique et les rires, les cigarettes et même le football… Les femmes sont devenues des ombres qui tentent de résister avec dignité. Des tribunaux improvisés rendent chaque jour leurs sentences absurdes et tragiques.
Kidane et les siens semblent un temps épargnés par le chaos de Tombouctou. Mais leur destin bascule le jour où Kidane tue accidentellement Amadou le pêcheur qui s'en est pris à GPS, sa vache préférée.
Il doit alors faire face aux nouvelles lois de ces occupants venus d’ailleurs…

Le film s'ouvre sur l'image d'une gazelle poursuivie par des hommes en armes, "il faut la fatiguer pas la tuer", expliquent-ils, comme une métaphore de la féminité, de la jeunesse ou de l'innocence, poursuivis par la barbarie. Le réalisateur, Abderrahmane Sissako, utilisent de nombreuses métaphores, comme Abdelkrim qui tire sur un buisson lové comme un pubis féminin entre deux dunes.

Sissako filme de façon sublime les paysages et ses personnages, comme cette famille de Touaregs, qui semble vivre dans une harmonie parfaite, ou ce match de foot poétique sans balle (car interdite). Il se moque ouvertement des djihadistes, qui ne connaissent pas grand chose à l'islam et se permettent d'entrer avec armes et baskets dans la mosquée ou de demander une jeune fille en mariage de façon menaçante, avant de se tromper de prénom —Fatima au lieu de Safia— devant l'imam. Des djihadistes qui tentent de maîtriser l'arabe, quitte à préférer l'anglais ("tu parles trop mal arabe"), qui fument en cachette ou font la cour à une femme mariée (Abdelkrim, qui visite Satima en l'absence de son mari) ou assènent des truismes comme "Nul n'échappe à son destin".

L’inspiration du réalisateur vient de faits réels. En juillet 2012, dans la petite ville d’Aguelhok au Mali, un couple d’une trentaine d’années est placé dans deux trous creusés dans le sol en place publique, puis lapidé. Dans ce village contrôlé par des hommes, leur unique faute a été d’avoir eu des enfants hors mariage. Ce n'est pas tout, puisque l'histoire de l'homme qui est racontée dans le film, est inspirée de l'exécution d'un Touareg sur la Place de Tombouctou. Le personnage de Zabou dans Timbuktu existe dans la réalité. Cette ancienne danseuse du crazy-horse qui exerçait ce métier durant les années 60 est la seule femme qui, au milieu des djihadistes, possède des droits que les autres femmes n'ont pas. Le réalisateur précise : "Elle s’habille comme dans le film, elle a toujours un coq sur l’épaule et elle parle très bien français. Quand les djihadistes étaient à Gao, c’était la seule qui pouvait marcher sans se couvrir la tête, la seule qui pouvait chanter, danser, fumer, et leur dire qu’ils étaient « des connards ». Autrement dit : l’interdit est permis quand la personne est folle."