mardi 31 octobre 2006


KATERINE À L'OLYMPIA

Philippe Katerine donnait un concert parisien le 30 octobre à l'Olympia, après ses passages au Point Ephémère, à la Cigale et une grande tournée française. Pour l'avoir vu dans ces deux salles et cet été en festival, pas de grosses surprises. En seconde première partie, une douzaine de majorettes belges ont fait leur show au son de la Chevauchée des Walkyries, de Rondo Veneziano ou Madonna. Du coup, le concert de Katerine commence à 21h20.
Toujours la même entrée en matière: "Êtres Humains" a capella enchaîné à "Excuse-moi", puis presque tous les titres du dernier album. Mais notre trublion s'essaye aujourd'hui à la batterie en solo, pour s'accompagner sur "Louxor j'adore", tandis que les musiciens font les marioles dans un pré sur l'écran géant déroulé derrière la scène. Katerine, vêtu d'un caleçon et d'un body art bleu, reprend quelques anciennes chanson en solo à la guitare ("Poulet n°728 120") ou avec ses musiciens ("Prends moi la tête", "Parlez-vous anglais Monsieur Katerine ?"), avant de terminer comme il se doit vers 23h par "Louxor j'adore" avec les majorettes sous un déluge de confetti.

jeudi 26 octobre 2006


"THE BLACK BOOK"

Prochain film de Paul Verhoeven, qui sortira le 29 novembre, tourné dans sa patrie d'origine.
Le synopsis : La Haye, sous l’occupation allemande. La chanteuse Rachel Steinn tente, avec un groupe de Juifs, de
gagner la Hollande Méridionale, déjà libérée. Mais une patrouille allemande abat tous les réfugiés ; seule Rachel
échappe au massacre. Elle rejoint alors la Résistance et, sous le nom d’Ellis de Vries, parvient à infiltrer
le Service de Renseignements allemand et à se lier avec l’offi cier Müntze. Séduit, celui-ci lui offre un emploi...
Qui a trahi le groupe de Juifs ? Qui est le traître parmi les résistants ? Un des Allemands est-il finalement bon ? Les questionnements et retournements de situation rythment ce long film de 2h25. L'intrigue est du coup un peu touffue. Son intérêt réside surtout dans la reconstitution de l'occupation, de la résistance, de la torture par la Gestapo, de la traque des personnes d'origine juive… Une atmosphère de peur dans laquelle on ne peut faire confiance à personne, où la mort peut vous surprendre à tout moment.
La dernière image du film, le kibboutz où a trouvé refuge Rachel, est pleine de sens : les Juifs, en cherchant la paix sur le territoire d'Israël, n'y connaissant qu'une guerre perpétuelle…

"LES LUMIÈRES DE LA VILLE"

La Cité de la Musique proposait deux ciné-concerts, avec l'Orchestre de la Radio Flamande: "Les Temps Modernes" et "les Lumières de la Ville" de Charlie Chaplin. Ce dernier a composé l'essentiel des musiques de ses films. Scénariste, réalisateur, acteur et compositeur… son génie s'exprimait de la plus belle des façons grâce à ce concert symphonique donné pendant la projection des "Lumières de la Ville".

"THE QUEEN"

Stephen Frears s'attaque à la monarchie britannique et à la mort de Lady Diana. Son film relate les quelques jours qui ont séparé le décès de Lady Di à Paris dans un accident de voiture en 1997, et ses funérailles nationales. Entre-temps, la reine Elisabeth II se terre à Balmoral, loin de Londres, ne faisant aucune déclaration et refusant des funérailles publiques, considérant que Lady Di ne faisait plus partie de la famille royale depuis son divorce avec son fils, le prince Charles. Un jeune premier ministre, Tony Blair, va flatter l'opinion britannique par ses déclarations sur la "princesse du peuple". Le moderniste s'oppose à la passéiste reine d'Angleterre, qui a connu 8 Premiers ministres, depuis Churchill. La couronne est remise en cause par ses sujets, mais le sémillant Tony Blair sauvera la reine (mince, j'ai raconté la fin).
Elisabeth II est merveilleusement jouée par Helen Mirren. La reine y apparaît pleine de préjugés, rétrograde, têtue, mais aussi garante de l'unité du pays et de certaines traditions. Double de la mère de Tony Blair (c'est la thèse du film, elle aurait eu le même âge) et grand-mère attentive des deux fils de Lady Di, Elisabeth II devient vite un personnage très attachant, juste un peu dépassé par les événements, mais tellement rassurante face à l'adversité.
En revanche, Stephen Frears remet quatre couches d'archives d'époque sur les larmes des Britanniques et le charme de Lady Di, jouant un peu facilement la carte sentimentale. Lady Di est morte, mais elle a vécu ce que peu de femmes auront la chance de vivre. "The people's princess" était aussi une princesse people, d'où tout ce ramdam médiatique…
Très belle musique d'Alexandre Desplat.

mercredi 25 octobre 2006


CHAMPION ET SES G-STRINGS AU NOUVEAU CASINO

Le Québécois Maxime Morin n'est pas un nouveau venu dans l'electro. À Montréal, on l'a connu en tant que DJ sous les noms de Madmax et Le Max, avant qu'il ne s'associe avec le compositeur de la B.O. des "Triplettes de Belleville", pour créer de la musique de pub et de film. Champion est son nouveau projet, Maxime s'occupe des rythmes électroniques sur son ordinateur portable, tandis que 4 guitaristes et une bassiste jouent sur scène. La puissance des guitares est démultipliée par celle des beats electro. Bon, au bout de 30 minutes, cela tourne un peu en rond, les rythmiques sont un peu toujours les mêmes… Heureusement débarque une chanteuse, qui va redonner du souffle à cette performance. Une énergie rock et/ou techno à découvrir impérativement sur scène. L'album "Chill'en All" est très différent, plus hypnotique.

NOUVELLE VAGUE EN CONCERT

Le concept de ce groupe créé par Marc Collin: faire des reprises de titres new wave (d'où le nom du groupe) façon bossa nova. Le premier album s'est très bien vendu, le second a forcément moins surpris. Sur scène, contrebasse, guitare sèche, clavier, accordéon et deux chanteuses. De bons musiciens, et évidemment de bonnes chansons: les Clash, Depeche Mode… Mention spéciale pour la reprise "Fade to Grey" de Visage, version intimiste au violoncelle.

lundi 23 octobre 2006



JURASSIC 5 AU BATACLAN

Concert archi-complet pour les rappeurs américains venus défendre leur dernier album à Paris samedi 21 octobre. Chaude ambiance à l'intérieur, avec un gros son bien funky, mais surtout quatre rappeurs hors-pair et très complémentaires. Les classiques s'entremèlaient aux titres du dernier album, servis par DJ Numark, qui a pris la relève de DJ Cut Chemist, occupé à chercher des 45 tours avec DJ Shadow. Uncle Nu nous a lui aussi fait son show, avec sa mini-platine autour du cou, puis en s'amusant avec des gros jouets style Fisher Price. Vibes old school, rap tonitruant et excellents instrus, 1h30 de très bon show (De la Soul devrait s'en inspirer…).

"QUARTETT" PAR BOB WILSON

« QUARTETT» se joue jusqu’au 20 décembre 2006 au Théâtre de l’Odéon. Enfin, je ne sais pas si il y a encore quelqu’un qui ne le savait pas, vue la presse dithyrambique qui a salué ce spectacle. Le texte coup de poing de Heiner Müller, adapté des « Liaisons Dangereuses », est servi par une mise en scène toute aussi audacieuse. Robert Wilson mixe théâtre, musique, lumières, références à la danse et au cinéma dans une mise en scène glacée. Isabelle Huppert se crispe au son de percussions qui résonnent dans tout le théâtre, elle ressasse les mêmes paroles, coincée dans une superbe robe-fourreau violette. Elle fait face à Ariel Garcia Valdes (Valmont), sorte de Lucifer vociférant ou de Nosferatu sado-maso, enveloppé de rouge.
Le tout est servi par des décors jouant beaucoup sur la géométrie, les effets de lumière et la dualité du plateau, divisé par un rideau transparent. C’est Michael Galasso (« In the Mood for Love »), qui signe une musique à cordes sérielle et sépulcrale.
Cet affrontement des deux amants, confrontés à l’autre, à la mort et au désir, est encore plus violent dans cette interprétation déshumanisée et autiste. En revanche, le texte qui ne fait que 22 pages, mérite d’être lu avant d’aller voir la pièce, afin de vraiment profiter d’un texte pris à partie par les comédiens.

mercredi 18 octobre 2006


"LA DRÔLESSE"

C'est l'un des premiers films de Jacques Doillon (après "L'An 01", "Les Doigts dans la Tête", "Un sac de Billes"…). L'histoire d'un simplet méprisé de tous qui enlève une gamine de 11 ans, en Normandie. On ne connaît pas vraiment ses motivations, et la gamine, Mado, s'attache rapidement à lui, enfermée avec lui dans son grenier.
Comme beaucoup des films de Doillon, celui-ci joue sur la confusion des sentiments et met en scène un enfant. Un film étrange, sans apriori, qui livre des personnages dans toute leur complexité.

(Rétrospective Jacques Doillon à la Cinémathèque)

dimanche 15 octobre 2006


"L'HOMME QUI RÉTRÉCIT"

Ce film américain de 1957 réalisé par Jack Arnold est à la fois une curiosité et un classique. Un homme irradié rétrécit jusqu'à se perdre dans l'infiment petit. Parabole sur la différence et l'exclusion (les nains, les petits, les difformes), le film utilise de nombreux effets spéciaux datés qui en font une curiosité. Il s'achève de façon très morale, notre héros accepte finalement sa condition de fourmi puisque Dieu l'a ainsi voulu, il rejoindra l'infini…

"RUE" AU GRAND PALAIS

Graff, BMX, roller, skate, DJs, rappeurs et basket ball… la culture de rue s'exposait durant 3 jours au Grand Palais. Pas grand chose à voir en fait, dans une ambiance assourdissante. Le public faisait 2 heures de queue dimanche après-midi pour faire de cet événement gratuit sa promenade dominicale.
Je citerai juste ce graffeur qui avait interpelé le ministre de la Culture : «J'ai l'impression d'être un siècle en arrière, vous faites défiler les sauvages au Grand Palais. Après, vous faites quoi sur le long terme ?»

samedi 14 octobre 2006

mercredi 11 octobre 2006



"L'OBJECTEUR" DE VINAVER
Nous sommes en 1950, la guerre froide bat son plein. Un jeune appelé, incarcéré pour refus d’obéissance, s’est évadé. Ou plutôt, il n’est pas rentré de la promenade nocturne dont les taulards ont pris l’habitude puisque la hiérarchie ferme les yeux. Il n’en faut pas plus pour que la machine se détraque… L’événement se répercute dans le monde civil : telle une pierre jetée dans l’eau, il provoque des remous dans toutes les directions… En 48 heures, toutes sortes de gens vont se croiser de manière imprévisible : le négociant en vin, l’ouvrier mécanicien, le prof d’histoire, le membre du Comité central du PCF, le magnat du textile et de la presse, l’agent de police, la jeune voisine au grand coeur, le petit journaliste qui monte…

Peu de monde dans la salle, et beaucoup sur scène, puisque les 11 acteurs interprètent près de 70 personnages. Si la mise en abyme ne semble pas indispensable (le metteur en scène arrête la pièce), la mise en scène est très rythmée, contemporaine sans verser dans le branché. Vinaver dépeint toute une société de haut en bas en 3 heures de spectacle et parvient à faire durer son histoire et son suspens.

"BAAL" DE BRECHT À L'ODÉON

La jeune troupe D'Ores et déjà monte, aux Ateliers Berthier du Théâtre de l'Odéon, la première pièce écrite par Bertold Brecht. Celle-ci a été remaniée par son auteur toute sa vie durant. La compagnie a décidé de jouer la deuxième des cinq versions, écrite en 1919 et inédite en français. Baal est un jeune mécréant qui aime les femmes et l'alcool. Cette version comprend 28 scènes qui s'enchaînent, chacune indépendante de l'autre, pour un spectacle qui dure 3 heures, entrecoupé de chansons.
Mais cette version semble inachevée, sans réel propos. C'est intéressant, mais surtout pour des exégètes de Brecht…

Sur scène ,c'est énergique, ça bouge, ça braille, ça part dans tous les sens, mais au détriment de l'histoire et de la psychologie des personnages. Cette jeune compagnie (ils ont entre 22 et 25 ans) a décidé de tuer le père, c'est-à-dire le metteur en scène, mais cela s'en ressent malheureusement. La provocation est reine dans la "mise en scène" comme dans le personnage de Baal. Ce dernier agite ses organes génitaux une bonne partie de la soirée sous les yeux du premier rang.

lundi 9 octobre 2006


LE MILLIARDAIRE DE G.CUKOR

Dans le cadre de la rétrospective George Cukor à la Cinémathèque, était projeté "Le Milliardaire" ("Let's Make Love"), un film de 1960 avec Marylin Monroe et Yves Montand. Ce dernier interprète le milliardaire en question, qui découvre qu'une comédie musicale s'apprête à le railler. Il assiste incognito aux répétitions et se fait engager pour jouer le rôle de ce milliardaire auquel il ressemble tellement ! À partir de là, les gags et les situations cocasses s'enchaînent, entremêlés de chansons. Une très bonne comédie américaine !
LE JOUEUR D'ÉCHECS

dimanche 8 octobre 2006


INTERVIEW DE CALI

Retranscription intégrale de l'interview que j'ai réalisée à la Maroquinerie avec Cali. Nous sommes dans le bureau de la salle de concert, derrière le guichet, un vendredi après-midi.

Comment s’est passée cette dernière tournée ?

Cali : C’était magique ! Je suis très fier de toute l’équipe, je le dis et je le redis. Nous étions 25 sur la route, et il n’y a pas eu une friction. Tous heureux d’être là. Et quand on voit les sacrifices pour mettre en œuvre tout cela : on quitte nos familles, tout le monde avait le sourire et faisait cela en étant très heureux.
Après, le public nous a réservé un accueil inimaginable, vraiment, c’est le mot. Aujourd’hui, j’ai pu mesurer combien de gens connaissaient les paroles des chansons. C’était vraiment incroyable, lorsqu’il y a une grosse masse de gens qui chante avec moi les chansons…
Et donc, cette tournée justifie beaucoup de choses. Je dis souvent que la vie est absurde, mais là, cela justifie de la vivre, vraiment…
Il y a eu moins de concerts qu’au cours de la première tournée. Parce que l’on a la chance d’avoir plus de monde en concerts. Donc on peut faire de plus grosses salles, comme des zéniths. Par exemple, si nous passons par Montpellier, on ne fait pas les quatre villes autour, on fait une seule grosse salle. Mais cela représente quand même 120 dates en moins d’un an.

Des salles plus grandes, cela change quelque chose ?

C’est autre chose. Moi, je suis toujours très heureux de jouer, qu’il y ait 40 personnes ou 60 000 comme au festival des Vieilles Charrues. L’idée, c’est de se dire : « Je suis chez moi sur scène, comment je peux faire rentrer tous ces gens dans ma chambre ? ». Il faut trouver le moyen de pouvoir communiquer, parfois on est confronté au gigantesque et au gigantisme. Par exemple, j’aime bien slammer, c’est-à-dire sauter sur les gens. Mais quand il y a 60 000 personnes, je vois mes amis, mes proches à côté de moi, qui sont très inquiets ! (rires)

D’ailleurs cela a failli mal se passer en 2005 aux Eurockéennes de Belfort. Vous n’avez pas eu peur ?

Mal passer… disons que je suis arrivé dépouillé, presque nu au bout du public. Je n’arrivais plus à revenir, c’était un peu comme le flux et le reflux des vagues qui vous renvoient vers le large. C’était quelque chose.
Si on me demande 10 minutes avant le concert si je vais slammer, je dis non, parce que j’ai peur. Le slam arrive en général en fin de spectacle, il y a toute cette émotion, et donc un peu on est sur une autre planète, il ne peut rien nous arriver. Du moins, il peut nous arriver des choses, mais on n’en est pas conscient.

Plonger dans le public et se laisser porter par la foule, le « stage diving », comment est-ce venu ?

Grâce à Mathias Malzieu des Dyonisos. C’est le capitaine Slam, le dieu qui vole sur les foules… Un jour, il est venu à un concert, il m’a attrapé par les fesses et m’a jeté dans le public. C’était à Paris, lors d’un concert du Fair, en 2003. Je n’avais jamais osé le faire. Et je me suis fait toucher, caresser, embrasser et porter. Pour moi, ce n’est plus du slam, c’est de la slamification.

C’est-à-dire ?

Je ne sais pas. C’est quelque peu christique : on tend les bras, on se fait porter, comme on marcherait sur l’eau. Cela devient tellement absurde que c’est beau. J’adore l’absurdité de toutes manières. C’est beau. C’est parti de lui, et maintenant je prends ce plaisir, vraiment.
Avec la foule de plus en plus importante, c’est un challenge, en plus, j’ai le vertige. Et je me suis retrouvé en haut de poteaux, là où sont perchés les techniciens lumière, à m’accrocher, à faire n’importe quoi… Mais j’ai besoin de faire n’importe quoi.

Pourquoi après cette tournée dans de grandes salles passer par le carde intime de la Maroquinerie à Paris ?

J’ai souvenir de la dernière date de la tournée pour l’album « L’Amour Parfait », après laquelle je suis tombé dans une petite dépression : c’était le vide total. On est très haut sur des falaises puis on en tombe… Même si l’on a une famille proche, des amis, c’est difficile de redescendre des sommets sur terre. La rupture est un peu brutale. À la Maroquinerie, on continue pour se poser doucement, avec un joli parachute qui nous fait descendre tranquillement. En plus, l’idée c’était de pouvoir déshabiller les chansons pour les rhabiller différemment avec des musiciens exceptionnels. Julien au piano, Blaise au trombone et Nicolas à la trompette. Avec cette joie de se dire que les gens qui ont vu plein de concerts vont encore découvrir autre chose. Et surtout aussi jouer de nouvelles chansons, faire des reprises, chanter avec des amis… C’est un petit peu comme une boum à la Maroq, chaque soir.

On vous sent heureux d’être sur scène. Qu’est-ce qui provoque cela ?

Pour moi, la scène c’est la récompense, c’est l’orgie. Récompense, c’est vraiment le mot. On a travaillé longtemps, pour apprendre les instruments, pour apprendre les chansons, pour répéter avec les musiciens. C’était très sérieux. Monter un spectacle, cela part du producteur de spectacles jusqu’à l’accordeur de guitare, il faut réfléchir à tout, c’est très très sérieux, très minutieux, tout est pesé, rien n’est laissé au hasard. Quand tout est prêt, je dis à mes musiciens : « Maintenant, on a le droit de s’amuser, c’est fini, c’est la récré, on lâche tout. » Et c’est ce qui se produit sur scène, c’est le résultat de tout ce travail. Donc, c’est peut-être cela.
Je me sens vraiment chez moi sur scène. Et j’ai fait tellement de conneries lorsque je jouais dans des bals de villages, qu’aujourd’hui des conneries sur scène et heureux d’être là, ça continue.

C’est par la scène que vous vous êtes fait connaître. C’est une récompense mais aussi un moyen…

Oui. Dès le départ, nous n’avons pas côtoyé les studios d’enregistrement, on voulait aller sur scène sans savoir jouer. Au début, j’étais dans des groupes punk, on ne savait pas s’accorder, on ne savait pas jouer, on poussait des cris… juste pour aller sur scène. Aujourd’hui je suis très touché par la performance de ces groupes et leur fraîcheur, qui ne savent pas très bien jouer mais qui ont une énergie, c’est cela qui est très important, on s’en fout des techniciens.
Moi, j’ai la chance d’avoir des techniciens, mais ce sont des techniciens qui ont l’âme punk.


Vous sortez un DVD sort pour Noël.

Oui, j’en suis très fier. Il s’appellera « La Vie ne sufit pas ». C’est un live traité comme un film, le concert devient prétexte à une fiction, un peu comme si l’on se promenait dans ma tête. On ne voulait pas faire un DVD où l’on ne voit un concert jamais aussi bien qu’en vrai. C’est filmé de plusieurs façons, en 8 mm, en 16 mm, en noir et blanc, en très belles images, un peu à la manière subjective dont étaient filmés les concerts de Bob Dylan dans les années 70.

Le public se demande souvent ce que vous prenez pour avoir une telle énergie.

Rien, j’ai fait du rugby. J’ai fait 17 ans de sport et de rugby. L’entraîneur nous disait qu’il fallait tout donner et que le premier qui peut encore parler en entrant dans les vestiaires, c’est qu’il n’a pas tout donné. Et c’est ce qui se produit aujourd’hui : nous revenons lessivés dans nos loges. L’idée c’est de tout donner et de donner encore après, aller jusqu’à ses limites. C’est très beau d’atteindre quelque chose au-delà de ce que l’on sait que l’on peut faire… parce que là, c’est l’inconnu. Cela donne de nouvelles sensations. Il m’arrive de vomir sur scène, avec l’émotion et l’épuisement.
Je fais la fête ensuite avec mes amis toute la nuit, mais avant de monter sur scène, je ne supporte pas d’être un autre, je ne bois que de l’eau.
Après un concert, j’ai déjà tenté deux ou trois fois d’aller me reposer à l’hôtel, tandis que mes amis sortaient. Je les ai entendus rentrer à 7 heures du matin, je ne dormais pas, j’avais les yeux grands ouverts. C’est impossible de dormir, il faut redescendre quoi qu’il arrive.

Avec ce rythme de vie, avez-vous le temps d’écrire de nouvelles chansons ?

Disons que je ne mets pas un défi en me disant qu’il faut préparer de nouvelles chansons, écrire des chansons m’aide à vivre, donc je le fais tout le temps. Mais on ne pense même pas au prochain album, parce qu’aujourd’hui, je prends plaisir à faire ce que je fais. Si je m’aperçois que je m’emmerde dans cette vie actuelle, je m’arrêterais. Donc je ne suis pas sûr de faire un autre album, on verra.
Il y a des chansons qui sont déjà prêtes. Ce qui est touchant, c’est de présenter des chansons au dernier moment aussi, à l’instant T, pour montrer une carte postale de notre vie actuelle.

Vos chansons sont nourries de votre « bordel amoureux », il existe toujours ou bien c’est du passé ?

Ce sera toujours le bordel amoureux. Je l’espère, car je n’envie pas les couples qui sont absolument heureux, cela doit être chiant à mourir. Un peu comme tous les gens qui m’entourent, on a beaucoup de choses à se raconter en fait ! Cela peut encore nourrir mes chansons, mais ce n’est qu’un prétexte, cela nourrit ma vie, point. Tout ce qui est chaotique est motivant. La barque ne bouge pas si la mer est plate, alors ce que je fais, c’est d’essayer de la remuer dans tous les sens pour me foutre à l’eau, comme cela, on a la possibilité d’essayer de remonter, c’est pas mal.

Comme vous le dîtes dans une chanson, mourir d’amour n’est plus de votre âge ?

Mourir d’amour sera toujours de mon âge ! Je dis le contraire dans « Elle m’a dit », mais évidemment, mes histoires d’amour m’ont souvent rapproché de la mort. Le reste n’est qu’un déguisement qui habille cette vie, mais il n’y a que l’amour qui compte. On peut avoir tout perdu, s’il reste l’amour, on peut survivre…

Vous n’en avez pas marre de chanter 120 fois la même chanson ?

Je ne me jette pas des fleurs, mais je suis assez fier de mes chansons car elles ne m’ennuient pas, je n’en ai pas marre de les chanter, sinon, je ne le ferais pas. Une chanson, je ne la donne pas si je n’en suis pas fier à 2000%.

En quoi être en tournée change votre vie ?

Nous sommes des troubadours dans des roulottes, qui vont de ville en ville. Lorsque nous arrivons, c’est toute une famille qui débarque, nous plantons un étandard et disons : « Oyez ! Oyez ! On est les Cali ! On va vous montrer ce que l’on sait faire. » Et nous avons tous les jours des sourires différents, des gens qui viennent nous remercier, c’est un bonheur total. C’est vrai que c’est une aventure de vie. J’ai la chance de jouer avec des musiciens qui viennent quasiment tous de Perpignan, du sud en tous cas. On se connaît bien, on connaît nos familles, nos amis, nos problèmes, et cela permet parfois lorsqu’il y a des moments de cafard de bien parler entre nous, et cela n’a pas de prix.
Et cela change la vie de tourner, car il faut être sacrément doué pour mener de front une vie de famille et une vie de groupe. Évidemment, nous ne partons pas à 8h au travail pour revenir à 18h à la maison, en revanche, quand on est à la maison, on y est vraiment, parfois pendant des mois entiers pendant lesquels nous sommes totalement avec les nôtres. Je lisais un article alarmant qui expliquait qu’un père et une mère passent en temps réel 12 minutes par jour avec leurs enfants, c’est-à-dire pour passer du temps avec ton enfant, lui lire une histoire, pas le voir ou le faire manger. Moi, quand je suis à la maison, je suis avec mes enfants, et je me dis que ce n’est pas 12 minutes…

Et le fait d’être populaire change aussi votre quotidien…

On ne va pas se plaindre ! Ceux qui se plaignent qu’on leur demande des autographes, c’est des connards ! C’est quand même merveilleux des gens qui vous arrêtent dans la rue pour vous dire « Merci pour ce que vous faîtes », « Votre chanson m’a aidé à demander la main de votre femme » ou tout simplement, il y a des gens qui m’ont dit que cela les aidait à vivre, c’est incroyable ! Évidemment, j’ai des proches qui m’empêchent d’attraper la grosse tête, mais ce n’est pas la grosse tête que l’on a, c’est le cœur énorme ! Moi, je me dis que je suis très très très chanceux. Il y a une phrase qui me plaît, c’est : les lauriers fânent plus vite que les roses. On en profite bien, et lorsque cela s’arrêtera, au moins, je pourrai dire « J’ai fait ça », et à mes petits-enfants je pourrai dire « Papy, un jour, il a nagé sur 60 000 personnes ! ».

Vous avez à l’esprit que cela s’arrêtera ?

Disons que j’ai l’impression d’avoir plusieurs vies. J’ai eu une vie de rugby, je pensais faire du rugby toute ma vie, et cela s’est arrêté. Aujourd’hui, j’ai une vie de musique, ensuite j’aurai peut-être une vie de mousse sur un bateau ou de moine zen en haut d’une montagne du Népal, on verra…

On n’y croit pas trop…

Pourquoi ? C’est ça qui est beau dans cette vie ! On peut croiser quelqu’un dans la rue, qui bouleverse notre vie et qui peut nous prendre par la main et par les yeux pour nous amener à l’autre bout du monde. Ça j’y crois tout le temps, un acte terroriste qui peut tout enclencher en quelques secondes.

Une vie de rugby, une vie de musique et une vie d’acteur ?

Je ne crois pas trop à une vie d’acteur, c’est vraiment un jeu. Mon ami Philippe Muilh, le réalisateur de « Magique », pour lequel j’ai écrit la musique, m’a proposé un rôle comme un cadeau. J’espère juste que je ne vais pas plomber la carrière des autres acteurs ! Si on m’avait proposé d’aller sur la Lune, j’aurais dit oui. C’est une expérience, je le prends comma ça. C’est un film ponctué de beaucoup de chansons, les mots étaient écrits et je les ai habillés de musique. Nous tournons en avril prochain, j’aurais a priori un rôle de clown.

Votre carrière est devenue fulgurante après la sortie de « L’Amour Parfait » chez Virgin. Est-ce que le succès passe aujourd’hui encore par une maison de disques ?

Je pense qu’il n’y a pas de recette. Auparavant, nous nous étions débrouillés pour trouver des concerts, des moyens de financer des auto-productions… Je dirais que l’essentiel pour moi a été de trouver un producteur de spectacles, parce que nous vivons par la scène. Et il m’a pris sous son aile une année avant que je signe avec la maison de disques. Il s’agit d’Asterios, et grâce à lui, nous avons pu jouer et tourner sans être connus du tout. On a beaucoup d’imagination lorsque l’on pense au disque que l’on va faire, mais on a pas les moyens de l’assumer. Et aujourd’hui, quelque part, les limites, c’est l’imagination, grâce à ça.
Après, il faut tomber sur les bons, il y a beaucoup de vermines et de pourris dans les maisons de disques, mais je suis sûr que je suis bien entouré.
Quand on parle de groupes alternatifs, il faut avoir refusé des propositions de majors du disque pour être alternatifs. On ne se décrète pas alternatifs, on l’est si l’on refuse des propositions, et il y a des groupes qui fonctionnent très bien en étant dans la marge, donc il n’y a pas de recette. Il y a aussi Internet, grâce auquel des groupes passent outre les maisons de disques. Je pense qu’il faut avoir des bons avec soi, mais surtout de bonnes chansons. Il y a aussi une bonne part de chance aussi, mais la chance vient si on la tente.

La tournée s’achève bientôt ?

Après la Maroquinerie, nous passons par la Belgique, avant de nous envoler pour le Canada où nous resterons une semaine. L’année prochaine sera sabbatique, donc nous donnerons avec d’autres artistes des concerts caritatifs et associatifs, mais aussi combatifs. Car je jouerai pour expliquer combien il est important d’aller voter pour empêcher que le diable ne soit pas élu aux prochaines élections.

Qui est le diable ?

Je n’aime pas dire son nom, Kissinger disait : « Parlez de moi en bien ou en mal, je m’en fiche tant que vous parlez de moi ». Je sais qu’aujourd’hui la personne qui fait voter ces lois ignobles sur l’immigration, je ne le porte pas dans mon cœur. Il me fait très peur. Nous donnerons des concerts pour expliquer cela à des jeunes et leur dire d’aller voter.

© N.D.

vendredi 6 octobre 2006


CALI INTIME

Le chanteur donne une série de concerts à la Maroquinerie du 4 au 10 octobre 2006. Après des Zénith et des festivals, il revient dans une petite salle pour des concerts un peu différents de ceux de la tournée qu'il achève. Sur scène, il est accompagné de son fidèle pianiste, et de deux cuivres: une trompette et un trombone/cor, qui donnent des accents jazzy ou honky tonk à certaines chansons. Ces dernières sont surtout issues du second album, "Menteur" : "Je ne vivrai pas sans toi", "Roberta", "Dolorosa", "Qui se soucie de moi"…

Deux nouvelles chansons : "Pablito", sur le thème de la transexualité (bof), et surtout une lettre de (dés)amour qui nous rassure quant au talent intact d'écriture de Cali. ("Vers la fin, elle me dit qu'elle m'a aimé, surtout quand j'étais absent. Je lui manquais jusqu'à mon retour. Est-ce que c'est ça le vrai amour ?")
Michael Kael le fait chevalier de Groland sur scène, devant un public prié de s'agenouiller. Nous n'échappons pas au traditionnel "stage diving" (photo), avant une reprise pas très convaincante quand même de "Richard" de Léo Ferré. Le concert se termine par un play back et de l'air guitar (jouer de la guitare sans guitare) sur "C'est quand le bonheur" live, histoire de faire un peu de pub au disque enregistré en public "Le Bordel Magnifique", sorti deux jours plus tôt.

EXPO TRAVELLING GUITARS

La Cité de la Musique propose une exposition consacrée à la guitare, de la Révolution française à nos jours. Au menu de cette petite expo, beaucoup de guitares exposées, dont leur ancêtre du XVIè siècle, exportée dans le Nouveau Monde, les guitares à double manche ou guitare-harpe françaises du XVIIIè siècle. A voir aussi, les guitares de Berlioz, de Django Reinhardt (photo), Jimi Hendrix, de Presti-Lagoya, de John Lennon ou de Georges Brassens. Le tout est illustré de nombreux extraits de concerts. Il manque un peu de pédagogie, notamment sur les différentes parties de la guitare (manche, table, cheviller…).
Expo à la Cité de la Musique jusqu'au 14 janvier 2007

LA NUIT DU RAT

Un opéra rock a été monté au Théâtre Dejazet à Paris par Boris Bergman et Richard Leduc. Comme son nom l'indique, le récit se déroule au milieu d'une société de rats, après la mort de leur roi auquel succède son goûteur. Les textes et la musique ne brillent malheureusement pas par leur originalité ou leur audace. Ni le jeu honnête des comédiens, ni leurs performances vocales ne sauvent cet opéra de l'ennui. On s'embête comme un rat mort…